Loin de nous l’idée de juger l’infidélité féminine plus sévèrement que l’infidélité masculine. Juridiquement, socialement, politiquement, et sur le plan tout simplement humain, la femme doit être traitée en égale de l’homme ! Mais, comme symptôme du manque d’harmonie d’un couple, l’infidélité est plus alarmante chez la femme. Car si l’homme le plus viril et le plus constant ne peut nier une composante donjuanesque en sa vie érotique, la femme vraiment éprise d’un homme n’est guère tentée par des aventures marginales . Un homme peut désirer ou même chercher des aventures, et cependant respecter, voire chérir tendrement son épouse, Il peut aussi avoir une harmonie sexuelle très satisfaisante avec sa femme et cependant nourrir de tendres sentiments plus ou moins platoniques pour une âme soeur en vertu de la dissociation de la tendresse et du désir que lui a imposée le  tabou de l’inceste, dès son jeune âge, dissociation qu’il ne parvient pas toujours à surmonter à la fin de l’adolescence. Tandis que si une femme se détache de son mari, c’est tout son être, corps et âme, qu’elle projette vers l’amant réel ou de rêve. Chez elle, le coeur et les sens ne sont en effet pas distincts comme ils le sont chez l’homme. C’est pourquoi Balzac a raison d’affirmer qu’il ne reste à un mari, si sa femme est éprise d’un autre homme, qu’un “cadavre animé” et cela quand bien même elle n’a pas encore cédé aux avances de l’amant.

Une femme qui-à tort ou à raison se sent frustrée dans son besoin, pour elle primordial, d’aimer et d’être aimée et guettée par l’adultère. Peut-être ne faillira-t-elle jamais, mais son coeur sera ailleurs.

Beaucoup d’hommes réduisent l’amour aux relations sexuelles, et s’imaginent qu’il suffit de « faire l’amour convenablement pour posséder une femme. Certes, lorsque le couple est profondément uni sur le plan affectif, la possession physique est une véritable rencontre où la femme se donne tout entière, corps et âme. Mais que la femme soit détachée affectivement de son mari, et la possession physique n’est pour ce dernier qu’un leurre: c’est à un autre qu’elle rêve ou bien elle rejette l’homme quel qu’il soit. Quand une femme est vraiment éprise, seul compte pour elle l’amour qu’elle est en train de vivre.

Le besoin de se sentir aimée et désirée

En général, ce n’est pas par désir de goûter à des plaisirs sensuels qu’une femme se laisse aller à une aventure extra-conjugale, mais avant tout par besoin de se sentir aimée et désirée. C’est pourquoi la femme qui, vers trente-cinq ou quarante ans, craint de ne plus être séduisante, est une proie relativement facile, parfois, pour un don Juan. Si son mari est devenu indifférent à ses charmes, s’il demeure plongé dans la lecture du journal précisément lorsqu’elle voudrait communiquer avec lui sur le plan affectif sans parler des maris méchants le premier venu qui fera attention à elle aura des chances de l’émouvoir. Elle ne pourra s’empêcher de lui vouer une reconnaissance profonde pour l’avoir à ses propres yeux revalorisée.

Pour le moins, elle sera touchée. Et lorsque le coeur d’une femme a été touché, cela peut conduire loin. Le danger est d’autant plus grand que la froideur de certains maris inhibés dans l’expression de leur tendresse, et cela vis-à-vis de leur femme tout particulièrement, tient à une cause aussi inconsciente que profonde: l’interdiction d’aimer qui, vers l’âge de cinq ou six ans, avait caractérisé le dénouement de leur drame oedipien. Il y aurait beaucoup à dire, aussi, sur ce monstre qui dévore tout, selon l’expression de Balzac contre lequel le mariage doit lutter sans cesse: l’habitude

J’aime profondément mon mari, dit une femme de trente- ans et mariée depuis onze ans, que cite le magazine du couples Marie Claire dans son Dossier de l’infidélité féminine (février 1970). Mais l’année dernière, j’ai eu un très mauvais passage. Je me sentais déprimée et vide, moche, inintéressante, sans raison, comme ça. Mon mari est très occupé, même parfois surmené par son travail. Quand il me voyait dans cet état-là, cela le mettait en colère. ..) Moi, j’aurais voulu qu’il me prenne dans ses bras, qu’il m’envoie des fleurs, pour rien, sans anniversaire, comme il le faisait autrefois. (…) Un jour, j’ai rencontré un homme que je n’aimais pas vraiment mais qui m’a écoutée, qui ma consolée, qui m’a fait rire. Il me téléphonait tous les jours, simplement, disait-il, pour entendre ma voix. C’était irrésistible. Je n’ai pas résisté. J’avais l’impression que la yie était belle à nouveau, puisque quelqu’un, dans Paris, avait envie d’entendre ma voix !

Oeil pour oeil et dents pour dents ?

L’infidélité-représailles est un jeu dangereux qui le plus souvent donne des fruits amers sans avoir procuré ni plaisir ni bonheur. Humiliées, blessées dans leur amour et dans leur fierté, certaines femmes croient devoir appliquer la loi du talion: oeil pour eil, dent pour dent, et trompent leur mari uniquement pour se venger fût-ce avec n’importe qui. Elles risquent d’y perdre tout respect… d’elles-mêmes, Et surtout, un dangereux cercle vicieux risque de s’instaurer: si le mari apprend que sa femme l’a trompé à son tour, il réagit en général fort mal devant un affront qui lui parait infiniment plus grave que celui qu’il a infligé lui-même, et le premier, à sa femme.

Souvent, l’infidélité féminine a pour origine une sourde rancoeur contre l’homme même si celui-ci ne l’a pas trompée